Dans le cadre de “En piste les artistes !”, le projet culturel de mise en avant d’artistes habitant la commune de Libramont, nous sommes partis à la rencontre de l’auteur de bande dessinée Etienne Willem. Un artiste qui a déjà réalisé une douzaine de BD et vendu des centaines de milliers d’exemplaires.

Dans les recoins du village de Saint-Pierre, situé au cœur de la commune de Libramont, se cache un artiste aux multiples talents. Né en Belgique en 1972, Etienne Willem est auteur de bande dessinée depuis une quinzaine d’années. À son actif, une douzaine de BD et environ 100.000 exemplaires vendus à travers l’Europe. “J’ai toujours voulu faire ce métier” nous confie-t-il.

“Je ne me souviens pas avoir imaginé faire un autre métier. Bien entendu, mes parents souhaitaient un diplôme sérieux, histoire de m’assurer un avenir. J’ai donc suivi des études en philosophie et lettres, en section histoire médiévale, à l’Université de Liège. C’est un parcours que je ne regrette absolument pas, car il m’a donné le goût de farfouiller dans les archives et les documentations “.

Une formation dans le monde des dessins animés 

Le parcours professionnel d’Etienne est tout à fait particulier. Le libramontois a débuté sa carrière au Grand-Duché de Luxembourg, au studio d’animation 352, comme superviseur storyboard. “Une fois le diplôme universitaire dans la poche, j’ai envoyé un premier projet chez Dupuis mais il n’a malheureusement pas été retenu. Au même moment, un ami m’a donné l’adresse d’un studio de dessin animé à Luxembourg” explique celui qui dessinait dans les marges de ses cahiers de cours au lieu d’écouter ses professeurs.

“Le studio était en pleine pré-production, donc à la recherche de dessinateurs. Je suis allé me présenter et le chef-présentateur de l’époque, qui travaille aujourd’hui chez Disney à Paris, a regardé mon book et m’a dit ‘Bon, il manque de la technique mais il y a quelque chose à faire’. Finalement, j’ai appris sur le tas et je suis resté dans ce studio pendant près de 20 ans”.

 

 Une expérience professionnelle enrichissante et formatrice, car le monde du dessin animé nécessite de travailler vite et de maîtriser plusieurs styles. “Dès qu’on change de projet, on change de style. J’ai eu la chance de travailler sur des productions télévisées, très faciles, tout comme sur des projets plus pointus, notamment “Le chant de la Mer”. 

Etienne Willem a ensuite vraiment commencé la bande dessinée en 2005. “J’ai débuté aux Editions Paquet, une maison suisse qui m’a donné ma chance. J’ai eu la chance de faire chez eux trois séries différentes : ‘Vieille bruyère et bas de soie’, ‘L’épée de D’Ardenois’ et ‘Les ailes du singe'”. Ensuite, une autre maison d’édition m’a fait une proposition, avec un scénario qui me plaisait. Cela a débouché sur ‘La fille de l’Exposition Universelle’. Là, je ne m’occupais plus du scénario, j’étais au service d’un scénariste. Une première pour moi, mais une expérience reposante car je n’avais pas besoin de me poser à chaque fois des questions sur l’histoire.”

Les grandes étapes de la réalisation d’une BD

La création d’une BD débute toujours par une idée, d’un ou plusieurs auteurs. “Il faut d’abord écrire le scénario, un peu comme une pièce de théâtre. Ensuite, on s’occupe de réaliser un storyboard, qui est un dessin très schématique. C’est d’ailleurs le même fonctionnement qu’au cinéma. Angles de vue, positions des personnages, dialogues, composition d’image, il faut s’occuper de tous les aspects”. 

“Une fois que le storyboard est terminé, il est soumis au scénariste et à l’éditeur. S’il est validé, on passe à la réalisation des planches, à l’ancienne (papier et crayon). Des planches qui doivent ensuite être une nouvelle fois validées avant un repassage à l’encre. En fin de processus, elles sont scannées et passent entre les mains des coloristes qui travaillent par informatique essentiellement”.

En parlant d’informatique, Etienne nous confie ne pas être un grand amateur des outils modernes. “J’ai du mal avec l’informatique. Je définis souvent l’informatique comme le meilleur moyen de gagner du temps quand on en a déjà” dit-il en rigolant. “C’est un outil formidable, qui permet beaucoup de choses. Mais les options sont si grandes que je m’y perdrais. Tandis qu’avec le papier, on est limité”.

 

Près de 100.000 exemplaires vendus 

En 15 ans de carrière, Etienne Willem a vendu entre 80.000 et 100.000 exemplaires. Un succès qui s’explique par le coup de crayon du dessinateur mais aussi par l’esprit créatif de l’auteur. “J’ai baigné dans les bandes dessinées durant mon enfance. Lucky Luke, Astérix, Spirou, les Schtroumpfs, un peu moins Tintin. À l’adolescence, j’ai découvert Thorgal, que j’ai dévoré” détaille Etienne.

“On s’inspire de tout. Jean Van Hamme, le scénariste de la BD XIII, disait qu’un bon scénario, c’est tout ce qu’on a lu, mais sans que cela ne se voit. Cela peut être l’extrait d’un film, une phrase dans un livre, un paysage, un objet. L’inspiration vient de tout. Toute la maestria d’un narrateur en BD, c’est justement de parvenir à remettre tous ces éléments sans qu’on sache dire exactement d’où ils viennent. De partir d’éléments disparates pour créer quelque chose de nouveau”

“La BD est un univers où sort chaque année 5000 nouveautés. Donc quand quelqu’un rentre dans une librairie et achète votre album, c’est déjà un petit miracle. J’ai la chance d’avoir un public qui me suit, des vieux fidèles qui me soutiennent depuis mes premiers albums”. 

Rencontrer le public, un élément vital 

Pour Etienne, la rencontre avec le public est un élément vital de sa profession. “La Quinzaine de la BD à Libramont (une fête durant laquelle le Neuvième Art est mis à l’honneur pendant deux semaines avec toute une série d’animations et activités sur, NDLR) est, par exemple, un événement très intéressant pour rencontrer le public libramontois, que finalement, je connais très peu. Quand je suis dans mon atelier, je travaille et quand je pars en festival, c’est souvent éloigné (Lyon, Québec, Pologne).”

“J’ai la chance de travailler à Libramont, au calme. En ville, il y a une émulation. On peut rencontrer les copains auteurs mais on peut aussi très vite se laisser distraire. Moi, le côté campagne retiré me plait bien. Quand j’en ai marre, je vais me promener dans la nature”.

La détermination d’Etienne Willem force d’autant plus le respect que le métier d’auteur de bande dessinée est un métier à risque, comme toutes les professions artistiques. “C’est un métier qui ne bénéficie d’aucun statut” précise l’artiste. “Déjà pas en France, mais encore moins en Belgique. La statut d’artiste, on ne sait pas trop à quoi ça ressemble. Dans ce métier, il faut donc toujours s’organiser en ayant un ou deux coups d’avance au cas ou un projet tombe à l’eau”. Mais avec un talent comme le sien, Etienne a encore de belles années devant lui.

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