Un photographe originaire d’Arlon suit le mouvement des Gilets Jaunes depuis plusieurs semaines pour immortaliser la contestation sociale. Il était présent à Paris samedi dernier lorsque les manifestations ont dégénéré.

Son nom vous est peut être familier : Randy Colas est un photographe amateur originaire du chef-lieu luxembourgeois et bien connu dans la région. Vous avez notamment pu le croiser lors d’événements en province de Luxembourg, dans lesquels il se rend avec son appareil photo en compagnie des équipes de Shootlux.

Mais la passion de Randy ne s’arrête pas là. Le jeune homme de 23 ans se déplace régulièrement en dehors de sa région lorsque des événements importants se produisent. C’était notamment le cas samedi dernier dans la capitale française, pour le 18e week-end de mobilisation des Gilets Jaunes.

Les scènes dignes d’une guerre civile sur les Champs-Élysées ont marqué les esprits. Les affrontements entre les casseurs et les forces de l’ordre ont tourné à la catastrophe. Jets de pavés, grenades dispersantes, incendies des magasins de luxe, destructions des monuments : rarement la Ville Lumière n’aura plongé dans un tel chaos.

Conserver une trace

Randy Colas s’est retrouvé au beau milieu de ces scènes de violence samedi dernier. Mais pour le photographe, c’est un mal pour un bien. Il désire avant tout immortaliser cette contestation sociale sans précédent. “Depuis novembre, j’ai eu l’occasion de me rendre plusieurs fois à Paris et Bruxelles pour couvrir les manifestations des Gilets Jaunes” confie-t-il à notre micro. “Je cherche à montrer ce que les grandes chaines d’informations ne montrent pas”.

“J’aime beaucoup la photographie sociale. Montrer ce que les gens ne voient pas ou ne veulent pas voir”

Pour Randy Colas, un décalage important s’opère parfois entre la réalité du terrain et ce que diffuse les médias généralistes. “Beaucoup de gens critiquent ce mouvement. Mais combien ont réellement pris le temps d’aller voir ce qu’il s’y passait ? Sans regarder ce que les chaines d’infos montrent ” s’interroge Randy.

“Il suffit de regarder ce qu’a diffusé BFM TV toute la journée de samedi par exemple : des vitrines cassées en boucle toute la journée. C’est vrai qu’il y’a eu énormément de casse. Mais à coté de ça, il y’a eu une marche pour le climat qui s’est bien déroulée, et d’autres rassemblement de GJ qui eux se sont passés dans le calme également. Toutes ces choses, on ne les voit jamais sur les grandes chaines d’infos”.

De nombreux manifestants déplorent en effet cette mauvaise couverture médiatique. Ce qui engendre de la colère et du rejet. Selon notre photographe amateur, les Gilets Jaunes n’apprécient plus la présence des photographes, qui sont placés dans le même panier que les médias classiques.

Une ambiance électrique sur place

Pour l’arlonais, les Gilets Jaunes est un mouvement social très complexe. Chaque week-end de contestation est différent du précédent. Selon lui, les manifestants ont énormément de revendications différentes et c’est ce qui fait leur force. “Dans quelques années, je ressortirai ces photos en espérant que les choses aient changées”.

En attendant, l’ambiance est toujours électrique dans les artères de la capitale française. Si la mobilisation semblait s’être essoufflée fin février, elle est toujours bien présente. “L’accueil de la police est souvent le même : une fouille pour essayer de confisquer le matériel de protection afin d’essayer empêcher de couvrir la manifestation” raconte Randy. “Je suis d’ailleurs a mon 3è masque à gaz confisquer depuis le mois de novembre, ce qui n’est pourtant pas interdit”.

Du côté des manifestants, l’accueil est plus compliqué. “Généralement, les blacks blocs (groupe de manifestants tout de noir vêtus et masqués pour l’anonymat. Il est formé principalement d’activistes issus des mouvances libertaires) n’aiment pas trop la présence des journalistes et essayent de nous faire dégager ou nous empêchent de prendre des photos”. “Jusqu’à maintenant, j’ai eu la chance de ne jamais avoir eu de problèmes. J’ai juste reçu un coup sur tête le 15 juillet lors des émeutes sur les Champs-Élysées, mais je portais un casque”.

“Le plus important sur place, c’est de rester neutre. De ne prendre parti avec personne”

Des dangers bien réels

Mais malgré ses protections, Randy Colas se sent parfois en danger. “J’ai peur d’être blessé par la police. Il est déjà arrivé plusieurs fois que nous soyons visé à hauteur de tête. Alors qu’ils savaient très bien que nous n’étions pas des manifestants mais simplement des journalistes , photographes”.

Une réalité qu’il a encore pu constater samedi dernier. Début d’après-midi, alors qu’un groupe de photographes était en train de prendre quelques clichés, un policier a lancé une grenade de désencerclement dans leur direction. “J’ai juste eu le temps de la voir arriver. J’ai heureusement juste reçu un éclat dans le bras”.

“
Il n’y a qu’une fois où je me suis vraiment senti en danger de la part des manifestants. C’était le 21 novembre à Feluy. Je me suis retrouvé face à des personnes dangereuses qui étaient uniquement là pour piller des camions. J’ai préféré partir car je ne me sentais vraiment pas en sécurité”.

Randy Colas est déjà prêt à repartir sur le terrain. Pour vivre sa passion de la photographie, mais aussi nous faire partager la réalité des mouvements sociaux. “Pour en avoir discuté avec plusieurs autres photographes, on ne sait pas réellement ce qui va se passer après un acte comme celui qui vient d’avoir lieu” conclut-t-il, interrogatif.

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